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La dialectique de la guerre et de la drogue en Israël

Les premières vagues d’immigrants sionistes en Palestine, au début du siècle dernier, sont souvent convaincues d’incarner une forme de supériorité occidentale sur un Orient somme toute décadent. Un tel préjugé nourrit une prévention tenace à l’encontre du haschich, produit en Syrie et au Liban, mais très populaire en Egypte, où l’interdiction du cannabis n’a fait qu’augmenter les cours, sans jamais enrayer sa consommation de masse.
La Palestine a beau n’être alors qu’un territoire de transit pour différents réseaux de trafiquants, le plus populaire des quotidiens en hébreu accuse en 1938 les nationalistes arabes de « s’adonner au haschich et à d’autres stupéfiants ». L’Etat d’Israël, dès sa fondation en 1948, institutionnalise la prohibition des stupéfiants, ce qui entraîne de vives polémiques, six ans plus tard, lors de la découverte de cannabis cultivé par de petits groupes d’immigrants venus du Maroc.
Le triomphe israélien lors de la Guerre des Six-Jours de 1967, avec l’occupation du territoire palestinien de Jérusalem-Est, de la Cisjordanie et de Gaza, coïncide avec la diffusion de la culture hippie dans la société israélienne. De plus en plus de jeunes, à l’issue de leur service militaire (de trois ans pour les hommes et de deux pour les femmes), choisissent de passer de longs mois en Inde, un pèlerinage très psychédélique qui tient lieu de sas vers la vie active en Israël. Une sous-culture banalisant la consommation des « drogues douces » prend progressivement racine.
L’invasion israélienne du Liban, en 1982, permet aux producteurs libanais de haschich d’accéder beaucoup plus facilement au marché israélien, où le cannabis, de moins en moins cher, gagne encore en popularité. Le volume de stupéfiants importés en Israël depuis le Liban est estimé, en 1983, à 700 tonnes de haschich et une demi-tonne d’héroïne. Une étude de 1988 considère qu’un adulte israélien sur dix serait un consommateur régulier, et un sur cent un toxicomane dépendant.
Un tel défi de santé publique s’aggrave d’une authentique vulnérabilité en termes de sécurité. La milice pro-iranienne du Hezbollah a en effet mis la main sur une bonne partie de la production de haschich et d’héroïne au Liban, les stupéfiants devenant un appât, voire une monnaie d’échange, avec des officiers israéliens ainsi compromis. En 2000, un colonel israélien à la retraite, attiré à Dubaï par la perspective d’un deal juteux, y est kidnappé pour être livré au Hezbollah à Beyrouth.
Il n’est relâché que quatre ans plus tard, et en contrepartie de la libération par Israël de 435 détenus arabes, dont de hauts cadres de la milice chiite. En 2006, c’est un colonel israélien d’active qui est condamné à douze années de prison pour trafic de drogue et espionnage au profit du Hezbollah, qui rémunérait sa collaboration en héroïne. Ce verdict retentissant marque la fin d’un quart de siècle d’ère libanaise des stupéfiants en Israël.
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